On a longtemps pensé que la Terre était plate… Du sang menstruel impur au vent qui charrie le sperme, quelles erreurs avons-nous commises en matière de sexualité ? Quelles superstitions ont longtemps été associées au plaisir, à la conception d’un bébé ou à certaines pratiques sexuelles ?
Les bébés naissent de deux spermes. Pour le médecin grec Hippocrate (460-377 av. J.-C.), il existe deux spermes : un masculin et un féminin ; chaque sperme possédant à la fois les caractères mâles et féminins. C’est « la force ou la faiblesse relatives des spermes qui détermine la formation d’un foetus mâle ou femelle » (1). Quant à Aristote (384-322 av. J.-C.), il affirmera quelques dizaines d’années plus tard que l’eau froide favoriserait la naissance d’une fille, tandis que le vent du Nord amènerait celle d’un garçon.
Le vent charrie le sperme. Au 13e siècle, on pense que Dieu a essaimé des semences partout dans la nature et que la femme peut les avaler sans faire attention. Cela expliquait qu’elles puissent tomber enceintes, alors même que leurs maris étaient à la guerre !
Chaque testicule porte un sexe en son sein. Selon Claude Quillet, médecin poète et ecclésiastique, auteur en 1749 de La callipédie ou l’art d’avoir de beaux enfants, la bourse gauche contient les hommes et la droite les femmes. Pour avoir une fille ou un garçon, il convenait donc de serrer l’une ou l’autre des testicules lors du rapport sexuel (2).
Les règles sont un signe de possession démoniaque et rendent les enfants roux. Dans l’Antiquité, il était déconseillé d’approcher d’une menstruée sous peine de malédiction, tandis qu’au Moyen Age un livre intitulé Le marteau des sorcières (Malleus Maleficarum), permettait d’instruire des procès contre les menstruées, voire de légitimer des actes barbares envers ces dernières ! Jusqu’à la découverte de l’ovulation à la seconde moitié du 19e siècle, les règles étaient diabolisées. Enfin, selon une croyance populaire, les bébés conçus pendant les menstrues étaient voués à naitre roux. Cette histoire servait à faire l’effet d’une menace de punition au cas où un couple serait tenté de consommer pendant les règles (3).
L’homosexualité est une maladie. Punie du bûcher sous l’Inquisition et considérée comme une déviance jusqu’à la fin de 19e, l’homosexualité était traitée entre autres par lobotomie et électrochocs… Il faut attendre 1982 pour qu’elle soit dépénalisée en France et 1993 pour que l’OMS (Organisation mondiale de la santé) la raye de la liste des maladies (4).
La masturbation est néfaste. En Occident, la masturbation fut considérée comme un vice moral ou une perversion jusqu’au début du 20e siècle. Elle constituait aussi un péché d’onanisme. Ainsi, les médecins préconisaient largement des procédés cruels pour empêcher les enfants de se toucher : usage du fouet, ceintures de chasteté, appareils électriques anti-masturbation, camisole de force, excision du clitoris ou infibulation (entendez suture du vagin !), cautérisation au fer rouge, etc.
L’asperge excite les pucelles. Le légume chéri de Louis XIV fut interdit dans les pensionnats au 19e siècle, car on le soupçonnait d’être un terrible aphrodisiaque (5).
Le nombril est le sexe. Dans une enquête réalisée par l’Ifop dans les années 1970, plusieurs femmes ont déclaré avoir pensé pendant de nombreuses années que c’était par là qu’on faisait les bébés.
Les vieux ne font pas l’amour. Jusqu’à aujourd’hui, on a nié la sexualité des seniors ; or, on sait que 60 % des hommes et 64 % des femmes âgés de 60 à 80 ans affirment avoir des rapports sexuels et en être satisfaits.
L’homme a plus de désir que la femme. Aucune étude scientifique ne vient étayer cette théorie (6) ! Pourtant, selon la grande enquête nationale « Contexte de la sexualité en France » (CSF 2006), les hommes et surtout les femmes semblent adhérer à l’idée selon laquelle « par nature, les hommes ont plus de besoins sexuels que les femmes ». Il y a donc fort à parier que le désir des femmes ne soit pas moins important, mais simplement moins dicible.
Bref, on est encore loin d’avoir percé tous les mystères du monde et de la sexualité. Le plus sage est donc, sans nul doute, de savoir que l’on ne sait rien, à l’instar du philosophe Socrate.