Au Burkina Faso, la situation sécuritaire continue de se dégrader dans la province du Soum, dans le nord du pays, à la frontière avec le Mali. Depuis plusieurs semaines, des hommes armés ont pris le contrôle des sites d’orpaillage, l’une des principales activités économiques de la région. C’est notamment le cas vers la mine d’Inata.
« Aujourd’hui, c’est la loi des hommes en armes dans les mines artisanales », explique un membre de la société civile de Djibo. « Soit ils prélèvent une taxe sur notre production, soit ils la rachètent au prix qu’ils auront fixé », poursuit un orpailleur de la région. Et mieux vaut ne pas s’opposer aux hommes armés. Il y a quinze jours, deux mineurs artisanaux ont ainsi été tués vers la mine d’Ara.
Pourtant, l’armée et la gendarmerie sont présentes dans le Soum, à Tongomayel, Arbinda, Kelbo et Djibo. « Ils font des patrouilles mais ne restent jamais sur les sites d’orpaillage », se désole Baba Traoré, président de la Corporation nationale des artisans et exploitants des petites mines du Burkina. Les orpailleurs réclament des détachements fixes, au niveau des mines artisanales.
Des groupes difficiles à identifier
Depuis des semaines, les groupes armés intensifient aussi leur présence dans les villages, où ils prêchent, installent parfois des tribunaux ou encore prélèvent la zakat, une aumône mentionnée dans le Coran et transformée en taxe par les groupes terroristes. « Les prêches sont devenus réguliers dans les communes de Baraboule, Diguel et Nassoumbou », observe le maire d’une localité de la région.
Malgré leur présence accrue, il est encore difficile de rattacher ces hommes armés à des groupes terroristes. « Certains sont burkinabè, d’autres maliens, indique notre source à Djibo. Peut-être sont-ils des jihadistes, peut-être de simples bandits. Ils ont des armes et c’est tout ce qui compte. »
Un analyste sécuritaire explique :
“Les mouvements de ces hommes armés sont trop importants pour être de simples bandits. Pour autant, il est difficile de dire s’il s’agit du GSIM (Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans) ou de l’EIGS (l’Etat islamique dans le Grand Sahara). Les réseaux terroristes du Soum doivent se recomposer et se renforcer, d’où la stratégie de s’appuyer sur la conquête “des cœurs et des esprits” auprès des civils, qui n’ont de toute façon pas d’autre choix que de se plier à leurs exigences. Ils imposent ainsi les règles d’un financement du réseau par les activités d’orpaillage et l’économie souterraine.”
Avec plus de 50 tonnes d’or extraites l’année dernière, le Burkina Faso est le quatrième producteur du continent. Dans un rapport intitulé Reprendre en main la ruée vers l’or au Sahel central, publié l’année dernière, International Crisis Group, tirait déjà la sonnette d’alarme. L’accaparement de l’orpaillage par les groupes armés peut s’avérer très dangereux pour la sécurité de la région.
rfi