Le concepteur de la pyramide du Louvre et rénovateur de la National gallery of art de Washington est mort à 102 ans, dans la nuit de mercredi 15 à jeudi 16 mai. Pei avait l’art de concilier tradition et modernité. Un héritage de sa petite enfance en Chine.
Le musée de Suzhou, le siège de la Bank of China et l’hôtel du Parc des collines parfumées à Pékin: Ieoh Ming Pei n’aura laissé que trois de ses œuvres à son pays natal. C’est pourtant ici qu’il a puisé son inspiration, racontait-il à la fin de sa vie, et notamment dans sa petite enfance à Canton (où il est né le 26 avril 1917), puis à Shanghai où son père va trouver un emploi dans la finance avant de devenir le directeur de la Bank of China. Le petit Pei a alors dix ans.
Sur le chemin de l’école il lève la tête vers un grand bâtiment brun en construction : le futur Park Hôtel de Shanghai, dont il ramène les 24 étages et le toit en pyramide à la récréation et dans les conversations à la maison. C’est décidé Pei Lu Ming comme on l’appel en mandarin –Pei Ming Ieoh en cantonnais- sera architecte.
Ce sera même le premier architecte d’une veille famille de Suzhou qui a fait fortune dans la pharmacopée traditionnelle, rapporte notre correspondant à Pékin, Stéphane Lagarde. Toutes ses vacances, Pei Lu Ming les passe alors chez son grand père dans cette Venise de l’Orient célèbre pour ses jardins de pierres. De cette jeunesse à s’écorcher les genoux dans la rocaille, à franchir les petits ponts sur les canaux, Pei conservera l’image vivace de l’architecture traditionnelle chinoise ajoutée à la modernité de Shanghai.
1935, le départ pour les Etats-Unis
Fort de cet héritage, Ieoh Ming Pei part en 1935 aux États-Unis, cinq ans après le décès de sa mère flutiste et calligraphe, et 13 ans avant que son père Pei Puzi le rejoigne aux Etats-Unis.
Il y décroche un diplôme du Massachusetts Institute of Technology (MIT), puis un diplôme de design à l’université de Harvard (1948) où il fut l’élève de Walter Gropius, fondateur du Bauhaus et l’un des théoriciens du style international.
Naturalisé américain en 1954, il fonde l’année suivante son agence d’architectes, I.M. Pei et associés. La construction du Mile High Center, à Denver, Colorado, en 1959 est la première grande commande d’une longue série.
Un succès qui ne se dément pas dans les décennies suivantes, au cours desquelles M. Pei réalise plusieurs bâtiments importants, aux États-Unis comme en Chine. Il récolte en parallèle de multiples distinctions, en particulier la Médaille d’or de l’Institut américain d’architecture en 1979, la grande médaille d’or de l’Académie française d’architecture en 1981 et le Prix Pritzker en 1983, considéré comme le Nobel de l’architecture.
« Je suis resté 100 % chinois »
Cette même année, le président français lui demande de repenser le Grand Louvre. Ce qui donne la Pyramide du Louvre, projet très controversé, finalement inauguré en 1989 et aujourd’hui considéré comme une réussite.
Pei Lu Ming n’a jamais oublié ses racines chinoises souligne le Journal de la Jeunesse de Pékin. A ses trois garçons, il a attribué le caractère « Zhong » de « Zhongguo » (« Chine ») dans leur prénom relève le quotidien Wenhui à Shanghai. Sous les photos publiées ce vendredi sur le compte weibo du Musée de Suzhou que l’architecte considérait comme sa « petite fille », cette phrase attribuée au génie de la pyramide du Louvres : « Je suis resté 100 % chinois ».
Rfi