Tous les regards sont tournés vers Abdelaziz Bouteflika, qui devrait déposer sa cinquième candidature, malgré les appels de la rue pour qu’il y renonce.
Tous les regards sont bien sûr tournés vers Abdelaziz Bouteflika, qui devrait déposer sa cinquième candidature, malgré les appels de la rue pour qu’il y renonce.
- Abdelaziz Bouteflika en Suisse, sa candidature attendue
Le chef de l’Etat algérien, qui a fêté samedi ses 82 ans, est hospitalisé en Suisse depuis sept jours, officiellement pour « des examens médicaux périodiques ». Son retour en Algérie n’a toujours pas été annoncé.
Aucune disposition légale ne semble cependant obliger un candidat à se présenter en personne au Conseil constitutionnel pour y déposer son dossier. Samedi, M. Bouteflika a publié son patrimoine, comme l’exige des candidats la loi électorale.
« Ceux qui ont conditionné leur participation au retrait de la candidature du président de la République, sans le moindre scrupule pour le respect des règles de la compétition politique en démocratie, seront (…) déçus », fait savoir dimanche El-Moudjahid, organe de presse officiel du gouvernement dans son éditorial, traditionnel vecteur de messages.
Un important dispositif policier est déployé autour du Conseil constitutionnel et la rue dans laquelle il se trouve est fermée à la circulation depuis tôt le matin.
Samedi, le président Bouteflika a limogé son directeur de campagne, Abdelmalek Sellal, au lendemain de manifestations massives. M. Sellal, un ancien premier ministre qui avait animé les trois précédentes campagnes victorieuses de M. Bouteflika (2004, 2009, 2014), a été remplacé par le ministre des transports, Abdelghani Zaalane, a simplement annoncé l’agence officielle APS, citant « la direction de campagne » du chef de l’Etat.
Aucune explication n’a été donnée à ce changement. En l’absence physique de M. Bouteflika, qui ne s’est pas adressé aux Algériens depuis un accident vasculaire cérébral en 2013 et qui n’apparaît plus que rarement en public, M. Sellal se retrouvait en première ligne depuis le début de la contestation.
- Manifestations contre un 5e mandat de Bouteflika
Des centaines d’étudiants manifestent ce dimanche dans plusieurs villes algériennes, dont Alger. « Bouteflika dégage! », ont scandé une centaine d’étudiants, bloqués par la police à proximité de la Faculté centrale, en plein centre de la capitale, ont constaté des journalistes de l’Agence France-Presse (AFP).
Le site d’information TSA (Tout sur l’Algérie) signale des rassemblements similaires à Oran et Constantine, deuxième et troisième ville du pays, à Bouira (80 km au sud-est d’Alger), à Skikda et Guelma (350 et 380 km à l’est) ou Tiaret et Mostaganem (200 et 280 km au sud-ouest).
A Paris, des manifestants sont réunis sur la place de la République, un rassemblement à suivre avec notre journaliste Ghalia Kadiri :
- Peu d’adversaires crédibles face à M. Bouteflika
Peu de candidats semblent être en mesure de faire le poids face au président sortant.
Le général à la retraite Ali Ghediri, débarqué de façon fracassante sur la scène politique algérienne fin 2018 en promettant « le changement » et « une IIe République » s’est présenté dans la matinée au Conseil constitutionnel pour y déposer son dossier.
D’autres figures de l’opposition semblent tergiverser quant à leur candidature :
- Principal adversaire de M. Bouteflika aux présidentielles de 2004 et 2014, son ancien premier ministre Ali Benflis doit annoncer dimanche s’il se porte ou non candidat.
- Abderrezak Makri, président et candidat déclaré du Mouvement de la société pour la paix (MSP), principal parti islamiste qui a rompu en 2012 avec l’alliance présidentielle, doit lui aussi se décider dans la journée.
Quatre autres petits candidats ont déposé leur dossier de candidature :
- Abdelaziz Belaïd, 55 ans : transfuge du Front de libération nationale (FLN), la formation du président Bouteflika, qu’il a quittée en 2011 pour créer le Front Al-Moustakbel. Il a recueilli 3 % des voix à la présidentielle de 2014 ;
- Un ancien ministre du tourisme, Abdelkader Bengrina, président du Mouvement El Bina (islamiste), a annoncé avoir déposé samedi son dossier de candidature auprès du Conseil constitutionnel ;
- Deux quasi inconnus : Ali Zeghdoud, président du microscopique Rassemblement algérien (RA) et Abdelkrim Hamadi, un indépendant. Déjà candidats déclarés lors de précédentes présidentielles, leur dossier n’avait pas été validé.
Le Parti des travailleurs (PT), petite formation d’extrême gauche, a renoncé, en raison de la contestation, à présenter un candidat, pour la première fois depuis 2004. Enfin, l’homme d’affaires Rachid Nekkaz, omniprésent sur les réseaux sociaux et qui draine des foules de jeunes enthousiastes, a déclaré avoir rendez-vous dimanche après-midi au Conseil constitutionnel. Cependant, il semble ne pas remplir les conditions d’éligibilité : Il dit avoir obtenu la perte de sa nationalité française, mais la loi électorale prévoit qu’un candidat ne doit jamais « avoir possédé une autre nationalité »qu’algérienne.
Une fois les dossiers déposés, le Conseil constitutionnel statuera dans les dix jours sur leur validité.
Depuis le 22 février, le mouvement de protestation le plus important des deux dernières décennies a poussé des dizaines de milliers d’Algériens dans les rues pour exprimer leur opposition à un cinquième mandat d’Abdelaziz Bouteflika avant l’élection présidentielle prévue le 18 avril 2019.
Retrouvez ci-dessous les contenus de référence publiés par Le Monde pour comprendre la crise qui traverse le pays :
- Dans le sud de l’Algérie, Ouargla la contestataire : reportage dans cette région riche en hydrocarbures dont les habitants sont en colère contre le pouvoir.
- Le rôle des réseaux sociaux : comment les youtubeurs et les millions de vues de leurs vidéos jouent un rôle dans la mobilisation.
- Le pétrole, une rente qui s’essouffle : l’Algérie souffre de la chute du cours du baril et d’un manque de diversification industrielle.
- Vu de France : la diaspora algérienne, enthousiaste ou désabusée, suit de près les manifestations anti-Bouteflika.
- Entretien avec l’historienne Karima Dirèche : « Le régime a surestimé la patience du peuple »
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