L’ex-rébellion à dominante touareg du nord du Mali privilégiait dimanche la thèse d’un assassinat dans la mort la veille de son chef militaire Cheikh Ag Aoussa, tué par l’explosion de son véhicule à Kidal, dans le nord-est du pays.
Les conséquences sur le processus de paix de la mort de Cheikh Ag Aoussa, considéré comme “un faucon” de la Coordination des mouvements de l’Azawad (CMA, ex-rébellion) au sortir d’une réunion au camp de la Mission de l’ONU au Mali (Minusma) apparaissaient incertaines dans l’immédiat.
Un élu de Kidal et une source militaire africaine au sein de la Minusma ont affirmé à l’AFP qu’il avait été tué par l’explosion d’une mine au passage de sa voiture, mais selon un document interne de la CMA consulté par l’AFP “l’explosif a été placé sur le véhicule”, accréditant plutôt la thèse d’un assassinat.
Il est sorti de la réunion samedi en début de soirée avec quatre autres dirigeants de la CMA, avec lesquels il a accompli la prière du crépuscule devant le camp, puis tous sont repartis, Ag Aoussa en dernier, selon ce document.
L’explosion s’est produite peu après, à environ 500 mètres du camp, selon la même source.
Le soir même, la CMA, qui contrôle Kidal, a réclamé “une enquête indépendante”.
“Nous demandons une enquête indépendante, parce que parmi les thèses, il y a celle de l’attentat et de la voiture piégée”, a déclaré à l’AFP Mohamed Ag Oussène, membre de la CMA.
Des combats meurtriers pour le contrôle de Kidal ont opposé en juillet, août et septembre la CMA au Groupe d’autodéfense touareg Imghad et alliés (Gatia, pro-gouvernemental).
Ces hostilités entre groupes pourtant tous signataires de l’accord de paix de mai-juin 2015 suscitent l’inquiétude de la communauté internationale, qui a agité à plusieurs reprises ces dernières semaines la menace de “sanctions ciblées contre ceux qui entraveraient la mise en œuvre de l’accord”.
– Ancien jihadiste –
Touareg de la tribu des Ifoghas, Cheikh Ag Aoussa, était le numéro deux du Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA), formé en grande partie d’anciens membres du groupe jihadiste Ansar Dine, dirigé par une personnalité très influente parmi les Ifoghas, Iyad Ag Ghaly.
Dans un enregistrement sonore il y a un an, Iyad Ag Ghaly avait menacé les groupes signataires de l’accord de paix, les accusant de trahison.
Au déclenchement de la rébellion de 2012, Cheikh Ag Aoussa était le bras droit du chef d’Ansar Dine.
Mais en 2013, peu après l’intervention française de janvier de cette année-là, les routes des deux hommes s’écartent et il rejoint le Mouvement islamique de l’Azawad, qui deviendra en mai 2014 le HCUA.
Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes jihadistes liés à Al-Qaïda, à la faveur de la déroute de l’armée face à la rébellion, un temps alliée à ces groupes, qui l’ont ensuite évincée.
Les jihadistes en ont été en grande partie chassés après le lancement en 2013, à l’initiative de la France, d’une intervention militaire internationale, qui se poursuit actuellement.
Mais des zones entières échappent encore au contrôle des forces maliennes et étrangères, malgré la signature, sous pression de la communauté internationale, de l’accord de paix censé isoler définitivement les jihadistes, dont l’application accumule les retards.
Deux Casques bleus tchadiens, au moins trois militaires et un civil maliens ont été tués cette semaine dans des attaques imputées aux jihadistes dans le nord du pays.
Dans son dernier rapport trimestriel au Conseil de sécurité sur le Mali, rendu public cette semaine, le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon souligne que “les attaques contre les forces françaises et maliennes et la Minusma ont augmenté, et deviennent de plus en plus sophistiquées et complexes”.
Afp