Bien que la France ait autorisé en février l’extradition de François Compaoré, le frère de l’ancien président n’est toujours pas revenu au Burkina Faso. Ses avocats ont déposé un recours auprès du Conseil d’État.
Cela fait 22 ans ce dimanche 13 décembre que Norbert Zongo a été assassiné à Sapouy, dans le centre-est du Burkina Faso. Ce journaliste enquêtait alors sur la mort de David Ouedraogo, le chauffeur de François Compaoré, frère de l’ancien président Blaise Compaoré. Après avoir piétiné pendant des années, l’affaire Zongo a connu un nouveau souffle après la révolution de 2014.
Le recours de la défense de François Compaoré sera examiné le 18 décembre au Conseil d’État français. Pour ses avocats, son extradition est illégale. La défense avance plusieurs arguments. D’abord François Compaoré n’a jamais été inculpé au Burkina Faso. Ensuite, sa sécurité et celle de ses conseils ne saurait être garantie. Enfin, ils questionnent l’impartialité du Premier ministre français qui a émis le décret d’extradition, puisque lors de sa visite à Ouagadougou plusieurs années auparavant, le président Emmanuel Macron avait déjà annoncé cette procédure. « Nous avons des éléments qui prouvent que cette affaire est politique », explique Maître François Henri Briard, avocat de François Compaoré associé auprès du Conseil d’État.
“Nous disposons d’indices concordants et probants qui montrent que cette demande est purement politique. Or c’est un principe fondamentale du droit international, on n’extrade pas des ressortissants pour des motifs politiques. Enfin, nous avons une troisième série de moyens qui tiennent à l’absence de garanties effectives de protection, qu’il s’agisse du jugement de M. Compaoré au Burkina Faso ou encore de ses éventuelles conditions de détention et là nous sommes sur le terrain des traitements inhumains et dégradants qui ne manqueraient pas de lui être infligé s’il retournait dans son pays d’origine.”
« D’autre part, après la réélection du président Roch Marc Christian Kaboré, l’heure est plutôt à la réconciliation », conclut Pierre-Olivier Sur, autre avocat de François Compaoré. Un argument que balaie d’un revers de main Robert Zongo, frère du journaliste, qui estime « qu’il ne peut y avoir de réconciliation, si la lumière n’est pas faite sur cette affaire ».
« Je me dis que quand ils auront fini avec ces recours tordus, ils vont nous le rendre. Aujourd’hui, le [ex-]président Blaise Compaoré frappe à la porte pour rentrer au bercail, François Compaoré devrait copier quand même l’exemple de son frère. On ne demande qu’à écouter François Compaoré. Nous allons nous réconcilier mais on ne peut pas sauter les étapes, on ne peut pas passer du coq à l’âne. L’idée pour nous, c’est que ce qui est arrivé à Norbert ne puisse plus arriver à aucun Burkinabè digne de ce nom. »
Maître Prosper Fatama, avocat de la famille, estime quant à lui que « la réconciliation ne doit pas sanctionner l’impunité ».
rfi