Ce 7 avril sera lancée en France la plateforme Disney+. Un lancement repoussé par l’impact de la crise sanitaire qui touche le délicat équilibre audiovisuel.
Après un très bon démarrage le 12 novembre aux États-Unis, où il a déjà conquis près de 30 millions d’abonnés, Disney+ arrivera en France le 7 avril. Alors évidemment, on se dit que si le géant des médias a maintenu ce lancement malgré la crise sanitaire, c’est parce que la période est propice à ce type d’offre de vidéo à la demande. Il suffit de regarder la consommation de streaming vidéo durant la dernière semaine de mars: elle a pratiquement doublé pour atteindre 5 millions de visionnages par jour. Pour les deux tiers, cette consommation est imputable à Netflix qui assiste à un triplement de ses nouveaux abonnés et à une consommation, non plus le soir, mais tout au long de la journée.
Et pourtant, pour Disney, la période n’est pas aussi porteuse qu’il y paraît : le géant pensait pouvoir s’appuyer sur ses parcs d’attraction et ses films pour stimuler les abonnements. Mais les employés de ses parcs ont été mis au chômage technique, Disneyland Paris comme les cinémas sont fermés. Heureusement que Disney+ peut s’appuyer sur un partenariat exclusif avec Canal+. C’est par le biais de ce distributeur que la plateforme espère convaincre les Français de s’abonner à une offre incluant les films Pixar, Marvel ou Star Wars et The Mandalorian. En tout 500 films et 300 séries pour 7 euros par mois. Pour tenir compte de la saturation de la bande passante, qui l’a amené à retarder de deux semaines son lancement en France, Disney+ a accepté de dégrader d’un quart son débit en Europe.
Mais Disney +, c’est aussi un peu avec Netflix l’arbre magique qui cache la forêt de réalités plus dures. Car la filière du cinéma et de l’audiovisuel aujourd’hui, ce sont tous les tournages à l’arrêt, des sorties en salles retardées, des émissions déprogrammées, des auteurs en souffrance et des producteurs indépendants fragilisés. D’ailleurs, la plateforme française Salto a déjà fait savoir qu’elle ne pourrait pas être opérationnelle en septembre tant l’offre de programmes est complètement chamboulée.
L’arrêt des retransmissions sportives a des conséquences en chaîne. Canal + a par exemple refusé d’honorer un versement de 110 millions d’euros à la Ligue de football professionnel arguant d’un cas de force majeure : elle ne peut pas diffuser des matchs qui n’ont pas lieu. Le groupe a été très vite imité par Beinsports. De cette manne dépendent la vie des clubs. Et du succès de l’offre sportive dépend Canal+ et donc l’argent du cinéma. Cette semaine, le Centre national du cinéma a autorisé 31 films qui sortent d’ordinaire en salles à se diffuser directement sur Internet. On le voit, tous les principes sont aujourd’hui ébranlés.