En Gambie, les forums de discussions et d’échanges se multiplient. Plusieurs associations ont organisé une soirée ce week-end près de Banjul, pour parler des 22 années de dictature passées. Mais aussi pour évoquer ensemble l’avenir du pays. Un panel de membres de la société civile était rassemblé, pour échanger avec le public, et le ministre de l’Intérieur a assisté à une partie des débats. La date n’a pas été choisie au hasard, puisque ce week-end marque les 23 ans du coup d’Etat de Yahya Jammeh, le 22 juillet 1994. Ces rassemblements créent un espace ouvert au dialogue, inimaginable il y a de cela six mois.
« Réfléchir à la tyrannie et célébrer la liberté »… Le thème de la soirée annonce la couleur : il s’agit de libérer la parole sur le passé, mais aussi d’entendre les Gambiens sur ce qu’ils souhaitent pour la suite.
Amadou Janneh, ancien prisonnier politique, n’en revient pas du chemin parcouru par son pays en quelques mois. « J’ai perdu ma mère il y a plusieurs mois, et je ne pouvais même pas rentrer dans le pays pour assister à ses funérailles. Alors qu’aujourd’hui, on peut inviter des membres du gouvernement et on peut exprimer notre opinion sans crainte, c’est historique, et je suis très ému. »
Parmi les organisateurs, le centre pour les victimes de violations des droits de l’homme. Pour sa secrétaire, Ayesha Jammeh, c’est un soulagement de pouvoir parler librement. « Je me sens vraiment mieux, j’ai toujours senti que je devais faire quelque chose pour les familles qui ont perdu des proches, explique-t-elle. Les victimes ont droit à la parole, elles peuvent venir ici et dire tout ce qu’elles ont à dire. »
Bintou Kamara a vécu plusieurs années en France. Elle vient de rentrer, et découvre un pays transformé. « C’est nouveau, c’est quelque chose de récent, constate-t-elle. Beaucoup de personnes n’ont pas vraiment la possibilité de s’exprimer tous les jours, et ce genre de rencontres ça leur permet de dire les choses qu’ils ont au plus profond d’eux-mêmes. Et ils se rendent compte qu’il y a une réelle avancée dans le pays aujourd’hui. Parce qu’avant, ça, c’était impensable. »
Les associations planifient déjà de nouveaux forums d’échange pour les prochains mois.
rfi